Cela fait des années que les PME constituent le vivier d’emploi principal en France. Par quelles motifs cette tendances s’explique-t-elle ? On fait le point avec Gilles Lecointre, entrepreneur reconnu et professeur à l’Université de Paris Ouest.

Des chiffres éloquents !

L’environnement entrepreneurial français est jeune ! Il est boosté principalement par des entrepreneurs en herbe et des startups innovantes. La preuve ? 98 % des entreprises françaises aujourd’hui sont des TPE ou des PME à l’instar de AVO Carbon France, d’ECH Area ou de Ruel Etiquettes. Ce chiffre se passe de tout commentaire et nous prouve encore une fois pourquoi les TPE PME représentent la grande majorité des emplois salariés en France devant l’administration, les grandes entreprises étant en queue de peloton).

Les grandes structures ne créeront jamais assez d’emplois !

Aujourd’hui, on est face à un constat : la grande majorité des créations d’emploi vient des TPE PME sur les 10 dernières années et les grandes entreprises représentent, malgré leurs chiffres, une goutte d’eau de l’emploi en France.

Par conséquent, compter sur les grandes entreprises pour générer des opportunités d’emploi en France ne semble pas être une approche viable. Cette réalité découle de deux ensembles de motifs fondamentaux : d’une part, les grandes entreprises ont une orientation principalement internationale, ce qui les conduit vers des marchés à croissance plus soutenue, tout en offrant des occasions d’embauche généralement plus économiques. D’autre part, la gestion prédominante au sein de ces géants économiques se concentre sur l’agrégation, la quête de dimensions toujours plus imposantes, l’atteinte de niveaux de productivité optimaux, la réduction des dépenses ainsi que l’établissement de processus performants.

Malheureusement, aucune de ces stratégies ne favorise directement la création nette de postes de travail.

L’administration et les services publics ne font guère mieux

Même parmi les partis politiques de tendance plus progressiste, il est clair que l’heure est venue d’adopter des mesures de rigueur budgétaire. Pour eux, il est désormais primordial de rationaliser les fonctions administratives, de se focaliser sur les missions fondamentales de l’État, de ne pas remplacer les départs à la retraite, et en somme, de réduire de manière globale les effectifs de l’administration à long terme. Cette évolution majeure ne peut être enrayée, particulièrement dans un pays alourdi par des dettes considérables, et où l’efficacité de certains services publics demeure en deçà des normes internationales.

Créer des emplois durables : une solution à explorer en 2023 et au-delà ?

Les entités responsables de la création d’emplois sont celles qui osent prendre le risque de révolutionner le paysage du marché sur lequel elles opèrent. Lorsque cette entreprise réussit, le marché s’élargit grâce à la présentation de nouveaux produits répondant à une demande solvable. Ceci entraîne une croissance de l’offre (en raison des investissements requis pour sa mise en place), suivie par une croissance de la demande (qui à son tour stimule l’expansion de l’offre).

Cette dynamique correspond à la génération de richesses, et elle engendre une « multiplication » des emplois dans les économies aux niveaux d’emploi insuffisants. Ce phénomène, décrit par l’économiste renommé Keynes, conserve sa pertinence malgré les évolutions ultérieures de la pensée économique.

Toutefois, à une époque où l’État n’a plus les ressources nécessaires pour piloter l’économie comme le préconisait Keynes, la question se pose : comment stimuler les projets innovants et générateurs d’emplois ? Cette problématique devient plus complexe, car elle dépasse le cadre purement mécanique pour aborder le domaine sociologique, qui est en lui-même difficilement gouvernable.

À ce stade, il est opportun de se remémorer les concepts d’un autre penseur incontournable, Schumpeter, en ce qui concerne les innovations disruptives. Il s’agit de celles qui délibérément brisent les normes établies pour proposer un cadre alternatif, rompant ainsi avec les conventions prévalentes, les idées uniformes et conformistes, ainsi qu’avec les visions des éminences grises.